La réception de Robert Moray (1641), analysée par Patrick Négrier

Publié par Géplu
Dans Divers

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dimanche 30 novembre 2014
  • 10
    KERVELLA André
    7 décembre 2014 à 14h19 / Répondre

    Patrick Négrier m’envoie un courriel dans ma messagerie personnelle pour attirer mon attention sur sa notice consacrée à Moray et m’inviter à réagir. Je le fais bien volontiers, quoique les contraintes du Web ne permettent pas un examen minutieux des documents, démarche pourtant nécessaire dans une sereine confrontation d’opinions.

    En premier lieu, un écart doit être marqué. Négrier est un historien des idées, je préfère me présenter en historien des faits. Il cherche des filiations intellectuelles entre des personnages du passé, pour aboutir au présent et fonder du même coup sa propre vision de la franc-maçonnerie. Je cherche des ancrages dans l’événementiel, dans la matérialité des actions accomplies par les hommes, sans me soucier de légitimer en quelque manière mes options personnelles. Ainsi, bien que m’intéressant à l’Écossisme, je ne suis pas franc-maçon « écossais », et bien qu’ayant publié plusieurs ouvrages et articles sur les stuartistes, je ne suis pas le moins du monde enclin à plaider en faveur de leur conception de la monarchie ou de la religion.

    Pour ce qui concerne particulièrement la problématique abordée par Négrier dans cette notice, il me semble impératif en préambule à tout débat d’avancer une précaution de méthode. Il existe trois catégories de documents qui font allusion au Mot de Maçon. En premier lieu, il y a ceux qui s’inspirent d’une rumeur. Quelqu’un a entendu dire que ce Mot existe. Il en parle donc dans le brouillard, sans trop savoir qui le connaît et comment il se communique. En second lieu, il y a ceux qui rapportent un témoignage, une confidence faite par quelqu’un qui connaît le Mot, sans qu’il l’ait toutefois révélé. Alors, l’origine de cette source peut être ciblée. Enfin, il y a les révélations directes, celles qui émanent d’un détenteur du Mot. S’il se garde là encore de le divulguer, il assure le posséder.

    On peut bien sûr distribuer dans ces catégories les premiers « catéchismes » connus. Une habitude s’est installée depuis quelques décennies de les lire comme des textes fondateurs, et de leur appliquer une égalité de traitement. Sachant que plusieurs d’entre eux ont été sortis de l’oubli après l’apparition de la franc-maçonnerie, à l’instar des Old Charges qui ont intéressé des érudits une fois que certaines loges étaient déjà créées, ils réclament la plus grande circonspection quand on les aborde. Plusieurs, exploitant les rumeurs, ne sont que des parodies plus ou moins allègres. Comme telles, ils ne peuvent en rien être acceptés comme des reflets fiables de l’histoire réelle. Ils ont du sens, cela est indubitable. Pour autant, ils renseignent donc plus sur la perception que certains folliculaires profanes se font de la franc-maçonnerie que sur l’engagement authentique des francs-maçons eux-mêmes.

    Partant, la question du Mot de Maçon me semble fort simple à aborder. Quels sont les textes qui en parlent explicitement ? Et dans quelles circonstances ces textes ont-ils été produits ? Je n’accorde aucune importance aux hypothèses qui le présument en filigrane dans d’autres textes, qui prétendent en détecter la présence cachée, et qui procèdent du même coup par interpolations ou extrapolations. Une fois qu’on s’est accordé sur le fait que, à ce jour, la première apparition connue du Mot date des années 1630, dans l’œuvre d’Henry Adamson et dans des manuscrits issus du comte John Leslie of Rothes, seules les traces objectives de son emploi dans la documentation ultérieure sont à recenser. Il incombe alors à l’historien de prendre en compte le fait très prosaïque que ceux qui l’évoquent sont des protagonistes impliqués dans la lutte politique centrée sur les Stuarts. Soit dans les témoignages indirects mais ciblés, soit dans les témoignages directs. le Mason Word est tout bonnement un mot de reconnaissance partisan.

    J’ai du mal à suivre un cheminement de pensée qui part de l’allusion ouverte à la communication du Mot pour en déduire que ce mot était comme le pivot d’un rite. L’expression « Rite du Mot de maçon » est une invention récente. En tout cas, je ne l’ai personnellement rencontrée nulle part dans les archives proprement dites. En historiographie, elle ne signifie donc rien du tout, hormis qu’elle procède d’un phénomène analogue à ceux qui ont marqué l’apparition d’autres rites au fil des siècles, avec la rhétorique associée de revendication d’une tradition la plus ancienne possible (refuge dans une histoire des idées plus ou moins bien bricolée) et la tentation de disqualifier les contradicteurs ou les concurrents (posture agonistique plus ou moins bien assumée).

    Le document qui suggère que Robert Moray aurait possédé le Mot est, comme le dit Négrier, une note de John Evelyn dans une sorte de memento personnel. Cette note est sans date, mais elle peut être située autour des années 1670. Transcrite et publiée par Michael Cyril William Hunter dans The Occult Laboratory en 2001, elle n’apprend rien de plus que ce qui est connu par la rumeur à l’époque. On retrouve d’ailleurs dans L’Histoire naturelle du Staffordshire, de Robert Plot, en 1686, des passages presque similaires, notamment quand un franc-maçon est supposé cesser immédiatement tout travail dès qu’un étranger de la fraternité fait appel à lui. En tout cas, la référence à Robert Moray se trouve à la fin, sans qu’Evelyn ne dise rien ni sur le contenu du Mot, qu’il ne possède pas, ni sur ce que Robert Moray lui en aurait dit. D’ailleurs, l’essentiel de son propos, précise-t-il au moins, lui vient d’une dame écossaise qu’il laisse dans l’anonymat. « This I had from a Scotch Lady, who assured me of the Truth of it, and as I remember from Sir Rob. Moray, my most religious friend ». Tout cela paraît fort maigre pour développer une théorie sur les affinités religieuses de Moray, en particulier, au regard de son engagement intellectuel, en général.

  • 8
    HRM
    30 novembre 2014 à 23h43 / Répondre

    le titre complet :
    <>
    la stance du Mason word est dans le poème de la 3° muse, Erato, muse de la poésie lyrique et érotique

  • 7
    HRM
    30 novembre 2014 à 17h53 / Répondre

    le titre complet de l’ouvrage d’Adamson, du King James College,d’ Edinburgh est :
    « Thus Mr Gall assured it would be so
    And my good genius doth surely know
    For what we do presage is not in grosse
    For we be brethren of the Rosie Crosse
    We have the Mason word, and second sight,
    Things for to come we can foretell aright

    il s’agit donc du mot de Mason et de la double vue pour dire (prédire) les choses à venir … Ce qui dans un deuil « hilarant » renvoie à la magie et ici plus précisément à la nécromancie, chère aux légendes Pits, Scots et galiques
    Si un S avait été oublié il s’agirait de sword … dont il n’est pas dit ici qu’elle soit flamboyante

  • 4
    HRM
    30 novembre 2014 à 14h46 / Répondre

    30 novembre 2014 à 14 h 45 min / Répondre

    L’histoire est passionnante, mais effectivement où sont les pièces « authentiques » ? à quelle analyse expertale ces pièces ont-elles été soumises ..; nos amis et FF britons et scots ayant une longue expérience de faussaire unanimement reconnue, nous enchantent par ses mythes et les fables qu’ils fabriquent ainsi

    • 6
      chicon
      30 novembre 2014 à 17h00 / Répondre

      vous avez raison. L’Histoire des Rois de Bretagne de Geoffroy de Montmouth, bien que de lecture credible,n’est qu’invention a partir de recits oraux.Les brits ne sont effectivement pas tres serieux avec l’histoire .

  • 2
    chicon
    30 novembre 2014 à 13h23 / Répondre

    selon Stevenson les loges (ludges) constituees de professionnels du batiment qui pratiquaient le metier ( craft) avaient des contacts reguliers avec la cite ( borough) au sein d’une instance laique du genre echevinat des batiments (incorporations ) ne serait ce que pour financer les batiments ( eglises, batiments publics).
    La transmission du metier etait orale et gestuelle, La vision en trois dimensions et la connaissance de la geometrie rendaient l’acces au metier iimite, selectif donc reserve a une elite.
    Dans ces  » incorporations  » se rencontraient ainsi des gens de pouvoir et cultives, et d’autres attirees par le niveau de savoir de ses membres. En ces lieux on discourait, on travaillait ainsi la pre-science du divin au moyen de l’architecture dont on discourait.
    Ce sont les premices de la Franc Maconnerie en Ecosse
    Le Pasteur James Anderson lors d’une visite debut XVIII eme a Edinburg, attestee (record), aurait ete initie et….aurait ramene la Franc Maconnerie a Londres ensuite en 1717.
    Vous connaissez la suite.

    • 3
      NEGRIER
      30 novembre 2014 à 14h04 / Répondre

      Non. J’ai montré dans mes livres que la loge presbytérienne d’Aberdeen pratiquait le rite presbytérien du Mot de maçon depuis 1699 et que c’est le père du pasteur Anderson qui, membre de la loge d’Aberdeen, transmit le rite presbytérien du Mot de maçon à son fils James (qui était pasteur presbytérien), lequel transmit à son tour ce rite du Mot de maçon (le rituel donc de la loge d’Aberdeen) en décembre 1714 aux gentilshommes londoniens qui, fédérant quatre loges opératives de Londres auxquelles James Anderson transmit le rite du Mot de maçon (il était le chapelain de la loge de la cathédrale Saint-Paul de Londres), créèrent ainsi la Grande loge de Londres de 1717. Avant décembre 1714 ces 4 loges londoniennes pratiquaient le rite anglican des Anciens devoirs. L’innovation du pasteur James Anderson auprès de ces 4 loges londoniennes mit en colère Christopher Wren qui était un praticien et un partisan du traditionnel rite anglican des Anciens devoirs.
      Patrick Négrier

      • 5
        chicon
        30 novembre 2014 à 16h49 / Répondre

        il y a peu de documents (records) de la loge d’Aberdeen. Il faut voir ce que vous avez trouve, tout element probant est interessant pour cette periode.

      • 9
        chicon
        6 décembre 2014 à 21h31 / Répondre

        Sir Christopher Wren fut recu fin XVII par l’elitiste Societe des Macons libres et Acceptes qui ne comportait pas que des macons de metiers, accreditant la these de Stevenson. Il est curieux qu’Anderson ait passe sous silence cette periode dans ses Constitutions alors qu’il etait contemporain de Wren.

  • 1
    chicon
    30 novembre 2014 à 9h32 / Répondre

    Patrick Negrier aurait enfin trouve le Saint Graal des historiens maconniques: le chainon manquant de l’histoire maconnique, au XVI eme et XVII eme siecles, au dela des recherches de l’ecossais Stevenson.
    1599 est la date du premier  » maitre  » de St Mary Chapel a Edinburgh, encore fallait-il reconstituer en detail , sans interruption avec des faits certains, verifiables, l’histoire precedant ce veneralat . Stevenson a retrouve des traces de la continuite de cette histoire, et la confond comme etant celle du metier ( ludges) et des cites (borough) quand les loges etaient de metier (craft).
    A P Negrier de nous apporter les preuves qu’il a, y compris celle sur Anderson faussaire.

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